Mes premiers pas vers la transition énergétique citoyenne

Le 24 septembre, c'est la Journée de la Transition. Énergie Partagée, membre du Collectif pour la Transition, donne la parole à celles et ceux qui ont déjà fait le pari des énergies renouvelables citoyennes pour leur territoire : des porteurs de projet témoignent pour vous !

Languedoc-Roussillon, de la lutte aux initiatives concrètes !

Témoignage de Christian Mercier pour le projet photovoltaïque des Survoltés d’Aubais, porté par la SAS Le Watt Citoyen. Ce projet est à l’initiative du Collectif Territoire en Transition Vidourle-Vaunage, au printemps 2012.

Comment êtes-vous passés d'un petit noyau dur à une mobilisation collective sur votre territoire ?

Un groupe de 4 ou 5 personnes préoccupées par les problèmes environnementaux avait en 2010 participé à un atelier « découverte » du mouvement Territoire en Transition initié par Rob Hopkins en Angleterre. Ce stage organisé en Cévennes nous avait permis de nous familiariser avec les thèmes développés par Rob Hopkins: raréfaction « programmée » des ressources pétrolières notamment. Comment préparer nos territoires face à cette échéance, comment y faire face ici et maintenant, sans attendre des solutions qui viendraient du haut ?

Nous étions alors persuadés que les pressions des milieux économiques et la puissance des intérêts financiers liés à l’énergie mettraient tout en œuvre pour bloquer le plus longtemps possible toute transition énergétique . Arrivèrent à ce moment-là, début 2011, les premiers projets d’exploitation de gaz de schiste dans notre région, située sur le périmètre du permis de Montélimar.

Avec l’appui de l’association « Rencontre Citoyenne », notre petit groupe qui commençait à imaginer comment constituer un groupe Territoire en Transition se lance dans la mobilisation contre la recherche et l’exploitation des gaz de schiste. Un collectif d’une trentaine de personnes se constitue, et anime pendant 4 ou 5 mois 8 à 10 réunions publiques, avec projection du film Gazland, suivi d’un débat. C’est ainsi que nait le collectif « Garrigues Vaunage Gaz de Schiste non Merci », sur le territoire de deux communautés de communes allant de Sommières aux portes de Nîmes. Ce sont près de 800 personnes qui assistent alors à ces réunions, et qui ont été sensibilisées aux problèmes liés à l’énergie.

A l’automne 2011, après l’interdiction du procédé de recherche et d’exploitation appelé fracturation hydraulique, une partie des personnes engagées dans le combat contre les gaz de schiste décide de créer le « Collectif Territoire en Transition Vidourle Vaunage ». Ce groupe voit depuis ses effectifs osciller entre 15 et 20 membres qui se réunissent depuis tous les mois pour porter des initiatives de transition autour des thèmes de la relocalisation des productions alimentaire, des circuits courts alimentaire, de l’énergie, des transports, des déchets, de la citoyenneté. Un certain nombre de communes publient dans leurs bulletins municipaux des articles rédigés par le collectif sur les sujets environnementaux.

C’est donc ce collectif qui, après avoir dans un premier temps validé la faisabilité d’un parc PV sur l’ancienne décharge publique du Village d’Aubais, décide de « sortir » ce projet de la sphère Territoire en Transition, et de travailler  à la constitution d’une association: « Les Survoltés » qui aura la charge entre autres de porter la réalisation du Parc PV d’Aubais.

Quelles sont, selon vous, les particularités du projet ?

Dans l’esprit de ses promoteurs, l’un des objectifs de ce projet est bien entendu la production d’EnR (Énergie Renouvelable), où les citoyens seront majoritaires et dont une partie significative des revenus sera utilisée pour aider à l’émergence et au soutien à des projets concrets dans l’intérêt des citoyens du territoire.

L’association Les Survoltés sera détentrice d’une partie des fonds investis dans la SAS Le Watt Citoyen et interviendra chaque année auprès des « investisseurs citoyens »  afin de collecter des fonds qui lui permettront d’aider des projets d’intérêts général sur le Territoire : aide à l’émergence d’autres projets citoyens de production d’EnR, éducation à l’environnement des enfants dans les écoles et les activités extra scolaire, éveil à la science avec des associations spécialisées tels « Les Petits Débrouillards », aide aux AMAP, aux circuits courts alimentaire, faciliter la mise en place de covoiturage, et de moyens de déplacements doux, soutien à l’activité du Collectif Territoire en Transition, aide la réhabilitation thermique de l’habitat en liaison avec le Point Info Energie de Nîmes, et des professionnels du territoire,  développement de projets d’éducation populaire , et bien entendu à l’organisation de manifestations festives et culturelles favorisant le développement de la citoyenneté.

Quelles ont été les difficultés rencontrées ?

Les premières ont été liées à la technique du projet, mais elles ont rapidement été levées grâce à l’implication de l’équipe Enercoop Languedoc-Roussillon, de la Coopérative CoopSOLEIL, des membres du collectif TTVV, et des Survoltés. L’obstacle le plus important aura certainement été de trouver un terrain d’entente avec la commune pour la mise au point du bail nous permettant d’accéder à la location du terrain.

Quel est le meilleur souvenir dans cette aventure ?

L’aventure humaine, la rencontre avec toutes les personnes impliquées dans ce projet, avec une mention spéciale à Enercoop LR et sa fabuleuse équipe. Deuxième  mention spéciale à la Région LR, et tout particulièrement à l’équipe qui a mis en place l’appel à projet destiné à aider la réalisation de projets de production d’EnR Citoyenne, qui a concrètement été le « coup de pouce » décisif nous permettant la concrétisation de ce projet.

Quel serait le principal message à diffuser auprès de personnes qui se posent la question de s'engager dans la Transition Énergétique ?

L’engagement dans la Transition Energétique se traduit d’abord par une réflexion sur sa façon de vivre, de consommer, de son rapport au monde qui nous entoure et la prise de conscience que chacun de nos actes pourra avoir un impact sur le monde dans lequel nos enfants évolueront dans 20, 30 ou 50 ans.

Nous pouvons faire, agir, pour modifier, ici et maintenant, le cours des choses. C’est aussi la prise de conscience que l’on peut faire autre chose que de se battre contre, oui, seul ou collectivement, on a la possibilité d’agir et de modifier le cours des choses.

Mais participer à la Transition, c’est avant tout le plaisir de participer à un mouvement collectif, fait de découvertes, de rencontres enthousiasmantes, de partage et d’échanges. C’est inventer le monde de demain!

En Bretagne, cultiver l’expérience pour innover par la suite.

Témoignage de Jean-Luc Danet sur le projet OnCIMé, porté par un collectif d’habitants regroupés en association, Bretagne Energies Citoyennes (BEC).

Comment êtes-vous passés d'un noyau dur à une mobilisation collective sur votre territoire ?

Dans le cas de OnCIMè c’est un travail de plusieurs années : en 2009 déjà, BEC réalise un premier projet de centrale photovoltaïque sur la toiture d’un magasin Biocoop à Mellac en vendant l’électricité sur le réseau.

Par la suite, nous avons maintenu des actions d’animation sur le territoire. Nous nous sommes particulièrement engagés dans des ateliers sur la boucle énergétique locale de Lorient agglomération avec des études d’opportunité d’installations PV en autoconsommation.  Nous sommes restés en lien étroit avec les acteurs de l’énergie sur le territoire : Agence de l’énergie, Enercoop, Mairie de Lorient, Lorient agglomération, Conseil de Développement…etc.

La mobilisation pour le projet OnCIMè a été possible grâce au relai des réseaux de chacun des membres. Grâce à eux, le capital initial nécessaire à la constitution de la société locale a été réuni très vite. Par la suite, nous avons pu élargir le nombre d’actionnaires grâce aux réunions publiques d’information dans différentes communes du pays de Lorient. Nous avons réussi à réunir 38 750 € en quatre mois, ce qui nous a paru très long ! Maintenant avec un peu de recul nous réalisons que tout cela a été très vite, nous savons que s’il avait fallu réunir 50 ou 60 000€ nous y serions parvenu avec un peu plus de temps.

Actuellement, combien de personnes et d'acteurs participent au projet ?

66 actionnaires, les acteurs : Bretagne Energie Citoyenne (l’association), OnCIMè (la Société de projet), la Mairie de Lorient.

Quelles sont, selon vous, les particularités du projet ?

Le projet en lui-même ! Plus précisément, une centrale PV en autoconsommation et les panneaux en propriété de la société citoyenne pour lesquels la ville paie un loyer. Un contrat de location a été signé pour 15 ans. Les panneaux ont été installés sur la mairie et sur une école et sont exploités par la ville. Le contrat de location stipule aussi que nous devons organiser des actions de sensibilisation pour les usagers des sites équipés de nos panneaux PV. Ce qui nous permet de prolonger nos actions militantes auprès des usagers des bâtiments équipés de nos panneaux PV.

Quelles ont été les difficultés rencontrées ?

La définition du cadre juridique d’un projet citoyen avec la mairie et des conditions (durée, surfaces minimum, conditions de résiliation, conditions d’appel d’offres) pour que le projet soit acceptable pour les deux parties.

Une difficulté inattendue a été de trouver une assurance qui nous accepte…

Quel est le meilleur souvenir dans cette aventure ?

Je crois que c’est la fierté de réussir par nous-mêmes à mener ce projet 100% citoyen !

Crédit photo : C. Billemont

Aquitaine : commencer petit pour en faire plus !

Témoignage de Bruno Decle pour le projet « Un toit photovoltaïque à l’école d’Eysus », mené sous l’impulsion d’Oloron en Transition, qui accompagne les initiatives citoyennes autour des solutions écologiques : mobilité, énergies, habitat.

Comment avez-vous pu passer d'un noyau dur à une mobilisation collective sur votre territoire ?

Nous avons été inspirés par l’association Combrailles Durables, en Auvergne, qui ont décidé d’associer citoyens, entreprises et collectivités au développement des énergies renouvelables il y a plusieurs années. En cinq ans, Combrailles a su mobiliser plus de 230 personnes devenues coopérateurs de 11 centrales qui produisent de l’électricité et plus de 580 000 € ont été investis sur leur territoire. Alors pourquoi pas nous !

Nous nous sommes donc organisés pour produire notre énergie dans le Haut Béarn.

Actuellement, combien de personnes et d'acteurs participent au projet ?

Nous avons souhaité dès le départ développer des actions pédagogiques. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes rapprochés d’associations à but environnemental et d’une enseignante à Eysus. Par la suite, nous souhaitons organiser une formation adaptée aux enseignants du cycle 3.

Quelles sont, selon vous, les particularités du projet ?

Nous avons réussi à lancer le projet, organiser la campagne de souscription et mettre en route la production électrique. Nous avons commencé avec une toiture d’école, ce qui nous a permis de collecter rapidement  8 000 € auprès de citoyens.

Normandie, une exemplarité à cultiver

Citoyens, élus, acteurs locaux, associations, tous réunis autour du projet de Plaine Sud Energies
Citoyens, élus, acteurs locaux, associations, tous réunis autour du projet de Plaine Sud Energies

Témoignage de Patricia Oury pour le projet Plaine Sud Énergies, initié par l’ARDES (Association Régionale pour le Développement de l’Économie Solidaire) et accompagné par Énergie Partagée.

 

Comment avez-vous pu passer d'un noyau dur à une mobilisation collective sur votre territoire ?

Par l’organisation de réunions publiques notamment, puis le bouche-à-oreille.

Actuellement, combien de personnes et d'acteurs participent au projet ?

La SCIC Sarl Plaine Sud Energies compte 35 associés : 9 collectivités (8 communes et la communauté de communes), 2 associations, 1 entreprise, Énergie Partagée Investissement et des citoyens.

Quelles sont, selon vous, les particularités du projet ?

Ce projet citoyen a été le premier en Normandie. Il a permis de faire (re)connaître le mouvement des énergies citoyennes dans la région.

Trois installations solaires photovoltaïques ont été réalisées la même année.

Un projet pédagogique complet a été mené auprès des enfants des écoles et d’un centre de loisirs avec des partenaires locaux (les Petits Débrouillards, un espace info énergie et le syndicat d’électricité du Calvados)

Quelles ont été les difficultés rencontrées ?

Il a fallu dans un premier temps trouver une collectivité qui accepte de lancer l’initiative sur son territoire. Une première démarche avait été entreprise avec la Ville de Caen mais n’a pu aboutir.

Avec la communauté de communes Plaine Sud de Caen, il a fallu convaincre, rassurer et démontrer que c’était possible. L’élu en charge du développement durable a fortement soutenu le projet.

La baisse trimestrielle des tarifs d’achat a imposé le dépôt des demandes de raccordement très tôt, à un moment où l’association de préfiguration ne disposait pas encore de fonds. Elle a alors bénéficié d’une avance avec droit de reprise de la part de la communauté de communes. Ensuite, à partir du dépôt des demandes de raccordement, la Scic a dû réaliser les installations dans un délai de 18 mois (ce qui passe très vite quand il faut mobiliser, trouver les financements…).

La mobilisation des habitants a été difficile. Nous avons constaté que la question de l’énergie faisait peu partie des préoccupations de la population (2011-2012).

Quel est le meilleur souvenir dans cette aventure ?

La rencontre avec de nouvelles personnes, les échanges et la complémentarité des compétences qui rendent le projet possible, et la participation des enfants à l’inauguration des installations.

Quel serait le principal message à diffuser auprès de personnes qui se posent la question de s'engager dans la Transition énergétique ?

Le plaisir de s’engager et de contribuer, par une action concrète, à relever le défi auquel nous sommes tous confrontés. Il faut faire redescendre au niveau local les enjeux énergétiques et  se les réapproprier. Des projets où l’on apprend à faire ensemble !

Cette compilation est le fruit d’un travail collaboratif entre plusieurs personnes et acteurs du domaine des énergies renouvelables (association l’Âge de Faire, Énergie Partagée, Enercoop, la Nef, Le Cler).

Un grand merci aux citoyens qui portent ces projets pour leurs témoignages et partage de bonnes pratiques !