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Chaleur renouvelable citoyenne : les opérateurs énergétiques territoriaux citoyens bois-énergie au sein d’Énergie Partagée

plaquettes-forestieres

La chaleur représente près de la moitié de la demande énergétique nationale et les deux tiers des besoins énergétiques des bâtiments. Elle est produite à près de 80 % à partir de sources fossiles. Dans la lutte contre le changement climatique, il y a donc un fort enjeu à décarboner sa production.

Le développement de nouveaux opérateurs énergétiques territoriaux à gouvernance partagée est pour Énergie Partagée un moyen d’accélérer la mise en œuvre de la transition écologique.

Dans le domaine de la chaleur-bois, plusieurs acteurs ont émergé depuis une quinzaine d’années, proposant dans différents territoires un service de production et fourniture de chaleur en circuit court, avec une gouvernance partagée. Ils sont rassemblés aujourd’hui dans le collectif Chaleur Bois et Territoire (CBT), animé au sein d’Énergie Partagée.

Le bois : une ressource locale et durable

La chaleur renouvelable peut être produite de différentes manières, qui peuvent être mixées entre elles : la chaleur fatale, qui consiste à récupérer la chaleur rejetée par une industrie (fonderie, papèterie, agroalimentaire…), la géothermie, le solaire thermique ou encore le bois-énergie. La chaleur fatale (notamment issue de l’incinération de déchets ménagers) et le bois-énergie représentent actuellement 90 % de la production de chaleur renouvelable en France.

Eddie Chinal (ForestEner)

« L’intérêt du bois est qu’il est local, souvent prélevé dans un rayon de 80 km maximum ; il permet de ne pas mobiliser une énergie à l’autre bout de la planète, et de sortir de la dépendance géopolitique actuelle, comme pour le gaz russe, ou le gaz de schiste qu’on ne veut pas exploiter en France et qu’on importe des États-Unis », explique Eddie Chinal, président de la société ForestEner et administrateur d’Énergie Partagée.

Le bois peut être exploité en circuit court et participe à l’économie locale en encourageant les PME. Il peut être un co-produit de l’exploitation forestière dont l’activité est de faire du bois d’œuvre de construction. Produire la chaleur à partir d’énergie renouvelable, chez les particuliers, les industriels ou pour alimenter des réseaux de chaleur urbains, permet ainsi de relocaliser la production d’énergie tout en valorisant des ressources renouvelables et locales.

Le prix stable de la production de chaleur offre un avantage non négligeable aux consommateurs. Que ce soit pour le solaire thermique, la chaleur fatale ou la production de plaquettes forestières, le coût réside principalement dans l’investissement de départ et dans la maintenance des installations, puis il reste relativement stable dans le temps une fois la production lancée, contrairement au gaz ou au fioul qui ont pu connaître une inflation très importante ces dernières années.

Plaquettes bois forestières pour alimenter les chaufferies bois-énergie de ForestEner

Une filière au développement complexe

La gestion de l’exploitation des projets de chaleur renouvelable citoyenne (CRC) est plus complexe que celle des projets d’électricité, car elle englobe non seulement la production mais aussi la distribution. Tandis que les projets photovoltaïques citoyens peuvent être menés par des bénévoles, ceux axés sur la chaleur passent par un assemblage de compétences professionnelles à l’intérieur de l’opérateur sous la forme soit de création d’emplois soit de relations contractuelles étroites entre partenaires et prestataires.

Arno Foulon

Par ailleurs, « l’adhésion au bois-énergie n’est pas évidente ; d’une part  l’effet d’une mobilisation accrue du bois-énergie sur le rôle de puits de carbone des forêts, dans un contexte climatique conduisant à un dépérissement accru des arbres, fragilise le bilan carbone de cette filière. D’autre part, il est nécessaire de réduire la pollution aux particules dans les villes. Le bois-énergie peut être pointé du doigt », précise Arno Foulon, responsable du Label Énergie Partagée.

Sur les émissions locales de particules, la réglementation est plutôt stricte et des solutions existent avec l’installation de filtres à particules sur les chaudières dans les zones sensibles où la qualité de l’air est un sujet important. Sur la ressource en bois, pour que le recours au bois-énergie signifie chaleur décarbonée, il faut coupler une gestion durable de la ressource avec une mobilisation locale du bois-énergie. « Toute production d’énergie a un impact ; les projets citoyens de chaleur bois sont menés dans la concertation et les décisions sont prises localement pour limiter ces impacts, au cas par cas. Le meilleur moyen d’avoir des installations bien dimensionnées et bien réglées, en recherche d’une gestion durable de la ressource, est qu’elles soient portées en transparence et en coopération dans une logique d’économie sociale et solidaire. »

Les opérateurs énergétiques territoriaux au service d’une production locale

Les gros opérateurs énergétiques nationaux n’étant pas organisés pour répondre à la demande locale de petites communes sur des projets de puissance peu élevée, la création d’opérateurs territoriaux permettant la relocalisation de la production d’énergie renouvelable est devenue une solution efficace et possible. Énergie Partagée, en encourageant l’essaimage d’opérateurs adaptés aux spécificités de chaque territoire, est en train de créer une nouvelle offre de chaleur renouvelable pour des communes de moins de 5000 habitants, où les collectivités s’impliquent en devenant actionnaires.

Selon Eddie Chinal, « cela démultiplie les projets, car ces opérateurs permettent le passage à l’acte ; si les collectivités devaient faire seules, ce serait trop compliqué. Et le montage économique est totalement transparent, c’est un gros avantage pour les communes ».

Ces opérateurs énergétiques territoriaux gèrent les différentes étapes (développement, investissement, réalisation, exploitation), en s’appuyant sur des ressources territorialisées (naturelles, humaines) difficilement délocalisables. Ils travaillent en moyenne à l’échelle d’un département et, une fois en place, n’ont aucun problème à trouver de nombreux projets à réaliser !  Ce nouveau modèle de production et de consommation de l’énergie contribue ainsi à l’autonomisation énergétique des territoires et s’inscrit bien souvent dans des dynamiques locales de transition.

« Ces opérateurs énergétiques territoriaux répondent à un vrai besoin et proposent une offre qui manquait pour ces territoires. »

Structurer cette nouvelle offre de production de chaleur renouvelable

Énergie Partagée assure l’accompagnement des opérateurs énergétiques territoriaux coopératifs (OETC) spécialisés dans la filière bois-énergie à l’échelle nationale. Une dizaine d’opérateurs sont en fonctionnement actuellement et une autre dizaine sont émergents. Ils proposent un service de production-distribution de chaleur renouvelable en circuit court avec une gouvernance partagée. Leurs installations sont de plus en plus labellisées par Énergie Partagée pour leur démarche citoyenne.

Principalement positionnés en zone rurale sur des grappes de chaufferies de moins d’un mégawatt chacune, ces opérateurs proposent des contrats de fourniture de chaleur ou de délégation de service public aux collectivités ou institutions, ou gèrent des réseaux de chaleur dans le cadre de services publics locaux. Le domaine sociomédical présente les plus gros besoins en chaleur (EHPAD, hôpitaux…), avec les bâtiments communaux et intercommunaux (écoles, salles polyvalentes, piscines…).

Pour l’accompagnement des OETC, Énergie Partagée construit sa stratégie en concertation avec  l’ADEME. Une convention de partenariat et de financement signée tous les 3 ans concrétise ce soutien ;  la prochaine est prévue pour juin 2024 et fait la part belle à la chaleur renouvelable citoyenne.

« L’ADEME met en place des actions d’animation pour accélérer l’émergence des projets de chaleur et leur apporte un accompagnement technique et financier, via un Contrat Chaleur Renouvelable territorial. Aujourd’hui, l’ADEME soutient Énergie Partagée pour y diffuser ces nouveaux modèles de production de chaleur », rapporte Arno Foulon.

Le concours de l’ADEME aux actions d’Énergie Partagée est un socle qui lui permet de trouver d’autres cofinancements (Union européenne, fondations privées telles que Alpes Contrôles) afin de lancer ses programmes d’essaimage et d’animation de réseau. Soulignons à ce titre le programme en cours sur 2023-2025 intitulé « Accompagner des Opérateurs Energétiques Territoriaux et Citoyens pour des énergies renouvelables au service de l’ESS » subventionné par l’Union européenne au titre du Programme national FSE+ Emploi – Inclusion – Jeunesse – Compétences. Le cœur de cette nouvelle famille dans l’énergie citoyenne est constitué du collectif Chaleur Bois et Territoire (CBT).

 

Un collectif facilitant l’émergence d’OETC

Créé en 2018, le collectif Chaleur Bois et Territoire (CBT) rassemble des opérateurs énergétiques territoriaux de chaleur renouvelable, et travaille via les réseaux régionaux d’Énergie Partagée sur l’essaimage, la mise en réseau et les mutualisations.

On distingue deux types de public dans le collectif : d’une part les opérateurs déjà en activité, qui ont des besoins continus d’amélioration, souhaitent développer des outils communs (mutualisation d’un poste salarié…), et apprendre les uns des autres, et d’autre part des opérateurs émergents qui ont besoin du transfert d’expérience des premiers. Comme les projets citoyens de production d’électricité, ceux de production de chaleur sont très spécifiques au contexte territorial. C’est la plus-value d’Énergie Partagée de savoir adapter ces modèles aux enjeux locaux.

Nicolas Lepin (ERE 43)

Nicolas Lepin, chargé de projet chaleur renouvelable à la société coopérative ERE43 et coordinateur du CBT, constate : « Les acteurs du collectif sont divers : ils peuvent venir du monde forestier ou agricole et avoir déjà un lien avec la ressource (ils ont parfois déjà la pratique de vente de plaquettes par exemple). On retrouve des collectifs de photovoltaïque citoyen qui veulent aussi monter des projets chaleur, ou encore des collectivités qui se posent des questions sur la création d’une coopérative, etc. »

Nicolas Lepin accomplit au sein de ce collectif l’animation de réseau propre à Énergie Partagée : il se charge d’accueillir tous les questionnements et de recueillir les précieux retours d’expérience de l’existant pour accompagner les projets émergents. Il identifie les besoins communs et coordonne l’organisation de rencontres annuelles essentielles au partage entre ses membres.

Énergie Partagée joue deux rôles pour les structures qui composent le CBT : offrir un espace d’échanges entre opérateurs déjà installés ou émergents (sur des questions juridiques par exemple) et apporter un accompagnement spécifique « à la carte » à ceux qui le souhaitent (sur des enjeux de gouvernance par exemple).

Rémy Picavet (Bois Bocage Énergie)

« Le CBT apporte une réflexion collective sur de nombreux sujets », témoigne Rémy Picavet, directeur général de Bois Bocage Énergie, opérateur qui installe des chaufferies depuis 2008. « Si on veut répondre à un appel à projet par exemple, on peut poser des questions au sein du collectif, demander des retours d’expérience. C’est motivant, on ne se sent pas seul, on partage des aspirations communes. C’est le meilleur groupe de travail que j’ai pu côtoyer jusqu’à maintenant, mature, accueillant, sérieux, convivial ! »

Une centaine d’installations citoyennes de chaleur à multiplier par trois

La charte d’Énergie Partagée pour la filière bois est en cours d’écriture en 2024, afin de préciser les exigences en matière environnementale (distance d’approvisionnement, gestion des forêts, émission de particules, engagement d’actions en faveur d’économies d’énergie de la part des opérateurs ou des consommateurs…).

Énergie Partagée participe au programme européen ACCE, afin de voir ce qui se fait ailleurs en Europe, notamment en Allemagne ou dans les pays du nord, où la chaleur renouvelable est plus développée qu’en France.

Il y a quelques années encore, les installations (chaufferies ou réseaux de chaleur) de chaleur bois étaient une dizaine en France. Grâce à l’action d’Énergie Partagée, on compte actuellement une centaine de sites de production, tous opérateurs confondus.

L’objectif dans les années qui viennent est de multiplier par trois cette offre, et de développer l’outillage nécessaire au maillage de toute la France par des opérateurs capables d’offrir partout où il faut décarboner la production de chaleur, une chaleur renouvelable et citoyenne.

La réalisation de cet article a été cofinancée par l’Union européenne.

alpes contrôles fondation

La réalisation de cet article a été cofinancée par la Fondation Alpes Contrôles

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