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Décryptage des annonces de Barbara Pompili sur les EnR citoyennes

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Ce lundi 8 novembre, à l’occasion des 2ème Assises de l’énergie citoyenne organisées à Nantes, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a annoncé un plan d’actions en faveur des projets d’énergie renouvelable à gouvernance locale. Décryptage par Energie Partagée.

D’où viennent ces 10 mesures ?

Ces 10 mesures en faveur de l’énergie citoyenne sont issues des propositions du groupe de travail sur les projets d’énergie renouvelable à gouvernance locale, lancé officiellement par la Ministre de la transition écologique Barbara Pompili en début d’année 2021 et annoncé dès le Conseil de défense écologique spécial éolien du 8 décembre 2020 – “le gouvernement publiera d’ici 12 mois un plan d’action pour favoriser le développement des projets d’énergie renouvelable à gouvernance locale, qui concernera donc également le développement éolien”.  

Le 5 octobre dernier, Barbara Pompili annonçait 10 mesures pour un développement maîtrisé et responsable de l’éolien et le 3 novembre, 10 mesures pour accélérer le développement du photovoltaïque. Alors, ces 10 mesures en faveur de l’énergie citoyenne, c’est la même chose ou c’est nouveau ? Et qu’est-ce qu’on en pense à Energie Partagée ? 

Dans les grandes lignes : le Collectif pour l’Energie Citoyenne, dont Energie Partagée est un membre actif, a salué ces annonces lundi 8 novembre tout en appelant le gouvernement à engager ce plan d’actions dès à présent et à construire une volonté politique forte, afin d’accroître progressivement et durablement la place des acteurs locaux dans les projets d’énergie renouvelable. Retrouver le communiqué de presse du Collectif pour l’énergie citoyenne

Le décryptage mesure par mesure par Energie Partagée , c’est en-dessous (en cliquant sur chaque annonce). 

Axe 1 : Accélérer la dynamique des projets à gouvernance locale

1- 1000 nouveaux projets d’énergie renouvelable à gouvernance locale qui associent collectivités et citoyens, d’ici à 2028.

Explication

Pour la première fois, la France se dote d’un objectif en matière d’énergie citoyenne. C’est un jalon important qui donne le cap, reste à lui donner corps en le traduisant dans la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie et à mettre en oeuvre les moyens – via l’application des mesures annoncées et la définition de mesures complémentaires dans une feuille de route à définir (cf mesure 2). Ce qui compte surtout ici, c’est la dynamique : multiplier par cinq le nombre de projets portés par des acteurs locaux d’ici 2028. 

Sur quels projets porte l’objectif ? Cela reste à affiner mais on parle ici des projets de type citoyens, en particulier ceux qui associent collectifs citoyens et collectivités ou SEM. Les projets maîtrisés par les collectivités et les SEM mais sans citoyens (intermédiés ou non), qui sont des projets maîtrisés par les acteurs locaux et à encourager, ne sont pas comptabilisés ici – sinon on se rendra vite compte que l’objectif est déjà dépassé ! 

1000 projets, j’ai déjà entendu ça quelque part… En octobre dernier, la Ministre, dans le cadre de ses annonces sur le photovoltaïque, annonçait “1000 projets photovoltaïques sur foncier public d’ici 2025”.  C’est la même chose ? Non, on parle bien de 2 objectifs distincts : les 1000 projets citoyens ne seront pas nécessairement en photovoltaïque, et les 1000 projets PV sur foncier public ne seront pas nécessairement citoyens. Après si un projet citoyen photovoltaïque se fait sur du foncier public, il sera compté dans les 2 en toute logique. 

2- Décliner la trajectoire de développement dans la prochaine PPE via une feuille de route stratégique pour le développement des communautés d’énergie, conformément à l’article 23 de la loi Climat et Résilience.

Explication

La loi dite climat et résilience du 22 août 2021 prévoit (en l’occurrence à son article 99) que le développement des communautés d’énergies renouvelables et citoyennes sera intégré dans les sujets traités par les programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE) successives. Toutefois, étant donné la multitude des thématiques abordées par la PPE, le traitement de ce sujet au sein de la PPE sera forcément très synthétique.

C’est pour cela que le groupe de travail EnR à gouvernance locale a proposé de lancer l’élaboration d’une feuille de route stratégique plus détaillée en amont. Les annonces de la Ministre constituent une première brique de cette feuille de route à construire et à suivre dans le temps pour voir si on se situe bien sur la trajectoire de l’objectif fixé. 

3- Publier le décret précisant les caractéristiques et les modalités de constitution des communautés d’énergie renouvelable (CER) et des communautés d’énergie citoyennes (CEC), introduites par la loi énergie climat en 2020, le projet de texte, discuté au sein du groupe de travail, sera prochainement soumis à la consultation du Conseil supérieur de l’énergie puis du Conseil d’État.

Explication

Pas d’annonce fracassante ici, il s’agit de publier un décret fort attendu – et auquel Energie Partagée a contribué – sur la définition des communautés d’énergie. Restera ensuite à définir “à quoi ça sert” d’être reconnu communauté d’énergie, autrement dit les mesures de soutien aux communautés d’énergie. 

4- Encourager les projets à gouvernance locale dans les dispositifs nationaux de soutien public aux énergies renouvelables. Un bonus participatif a été mis en place dans les appels d’offres nationaux. Le guichet ouvert pour les projets éoliens sera prochainement révisé pour encourager les projets à gouvernance locale. Un suivi de ces dispositifs sera réalisé, afin de mieux appréhender leurs effets sur le développement des projets à gouvernance locale. Le ministère clarifiera également l’articulation entre les dispositifs de soutien nationaux et régionaux.

Explication

Au-delà du rappel des dispositifs de soutien existant (un bonus de notation dans les appels d’offre sur les ENR électriques, qui est également cité dans les 10 mesure sur l’éolien) et prévu mais non encore sécurisé (guichet ouvert éolien), c’est aussi l’annonce qu’un suivi de ces dispositifs sera réalisé – et notamment dans le cadre des appels d’offre, l’idée étant de voir si ça marche ou s’il faut développer d’autres outils.

Enfin, suite au dernier arrêté tarifaire sur les projets photovoltaïque en toiture de moins de 500 kWc, qui ancre l’interdiction du cumul des aides sur la production d’électricité (voir cette Tribune à l’initiative d’Energie Partagée), l’Etat prévoit une note de clarification sur les aides qui peuvent ou non être cumulées avec les dispositifs de soutien de type tarif d’achat.

On retiendra aussi que la mesure défendue de longue date par Energie Partagée et ses partenaires sur le photovoltaïque, à savoir une modulation du tarif à partir notamment du productible (et le cas échéant d’autres facteurs), n’a pas été reprise dans les annonces, même comme piste de travail. Nous continuerons à porter cette proposition, seule à même de vraiment répondre aux enjeux sur les petits projets photovoltaïques dans la moitié Nord de la France. 

Axe 2 : Accompagner les projets et communiquer.

5- Augmenter de 50% le nombre de conseillers pour les projets à gouvernance locale en Région. Un réseau de conseillers pour les projets à gouvernance locale est déjà en place en région, sous l’égide de l’ADEME. Il sera renforcé via une augmentation des effectifs de 50%. Cet accompagnement dans les territoires se fera en lien avec le nouveau réseau des conseillers Photovoltaïque et Eolien pour les collectivités territoriales de l’ADEME, qui sera prochainement déployé.

Explication

+50% d’effectifs en moyenne sur toute la France pour les réseaux régionaux de l’énergie citoyenne, c’est une bonne nouvelle ! Concrètement ça veut dire que le budget des Directions Régionales de l’ADEME pour le financement des réseaux régionaux va augmenter (peut-être pas partout pareil), on espère maintenant que les autres financeurs suivront.

6- Lancer une campagne nationale de communication, afin de mieux faire connaître les énergies citoyennes et leurs avantages pour les territoires, et appuyer les élus locaux en fournissant des outils de communication pour qu’ils puissent diffuser ces informations au plus près de leurs administrés.

Explication

Pour convaincre il faut informer, communiquer, sensibiliser, faire connaître les bonnes expériences… alors ça aussi c’est une bonne nouvelle !

7- Créer un observatoire des projets d’énergie renouvelable à gouvernance locale et lancer une étude de l’impact sur l’appropriation et l’adhésion locales des énergies renouvelables. Un observatoire national unique de la filière sera ainsi mis en place, en se basant sur les réalisations existantes de l’ADEME et d’Energie Partagée. Cela permettra de suivre l’évolution de la filière.

Explication

Beaucoup d’acteurs partagent la volonté de mieux suivre les projets à gouvernance locale. C’est aussi l’ambition d’Energie Partagée, qui travaille au renforcement et à l’élargissement de son observatoire – l’enjeu étant notamment de pouvoir rendre visibles des projets portés par des acteurs locaux, comme des collectivités ou des SEM, mais qui ne sont pas nécessairement connus d’Energie Partagée notamment parce qu’ils ne comportent pas de citoyens à la gouvernance.

A ce titre ils ne peuvent pas être labellisés Energie Partagée mais restent des dynamiques très intéressantes à suivre et visibiliser. Cet observatoire, annoncé par la Ministre, ne sera donc pas créé ex nihilo mais devrait bien s’appuyer sur l’observatoire d’Energie Partagée. 

Axe 3 : Simplifier le développement et le financement des projets.

8- Lever les freins financiers aux projets à gouvernance locale. Un groupe de travail sera mis en place avec les acteurs financiers, afin de travailler sur la simplification de l’investissement de citoyens dans les projets locaux mais aussi de l’accès au financement bancaire pour les projets à gouvernance locale.

Explication

Ici pas de mesure concrète à lancer dès maintenant mais plutôt des pistes de travail à approfondir. 

9- Diminuer les coûts de raccordement électrique pour les petits projets (moins de 500kW) en permettant de porter à 60 % la part de ces coûts prise en charge par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité. La loi climat et résilience permet cette évolution. Un arrêté sera prochainement pris pour mettre en œuvre cette disposition. Cela permettra de lever un frein au développement des projets citoyens, pour qui le raccordement est un poste de dépense important.

Explication

Déjà annoncée dans les 10 mesures pour accélérer le développement du photovoltaïque, cette mesure ne concerne pas uniquement les projets citoyens mais elle va effectivement réduire les coûts de raccordement pour les projets PV de moins de 500 kW, y compris citoyens. 

10- Dans le cadre du groupe de travail qui continuera de se réunir, poursuivre les travaux sur les sujets stratégiques qui nécessitent des évolutions règlementaires et/ou législatives : sur le soutien aux projets de chaleur, de gaz renouvelable et de biométhane ; sur la mobilisation par les collectivités locales de fonds en comptes courants associés ; sur le périmètre d’actions des communes et EPCI ; sur l’inclusion des SEM locales dans la liste des membres ou actionnaires d’une communauté d’énergie renouvelable.

Explication

Un certain nombre de mesures ne peuvent faire l’objet d’une décision ministérielle dans la mesure par exemple où elles sont en train d’être travaillées par le Parlement. Il s’agit ici d’affirmer la volonté du Ministère d’avancer sur ces sujets clés, on espère que cette volonté entraînera les autres Ministères ou administrations concernées.