Revaloriser un terrain anthropisé grâce à l’énergie citoyenne

Au sud-est de la commune de Mallemort, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, se trouve un ancien site d’enfouissement de déchets non dangereux de 10,5 hectares. Après une étude d’opportunité, la métropole d’Aix-Marseille-Provence, propriétaire du terrain, décide de lui donner une seconde vie.

En 2018, elle lance un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI), afin d’y développer un parc photovoltaïque au sol. Cet AMI s’inscrit dans le Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires (SRADDET) mis en place par la région PACA ; une stratégie visant notamment à lutter contre le changement climatique et à déployer la transition énergétique à l’échelle du territoire.

La dynamique territoriale et citoyenne au cœur du projet

La proposition du groupement constitué de CVE (Changeons notre Vision de l’Énergie), développeur de projets d’énergies renouvelables basé à Marseille, Enercoop Provence-Alpes-Côte d’Azur et Énergie Partagée, est retenue, jugée viable et en cohérence avec les critères de la métropole. En effet, l’ancrage territorial et la participation locale font partie des conditions au développement du projet. Ensemble, ils souhaitent mettre en place une démarche citoyenne, en impliquant les habitants et les acteurs du territoire dans la gouvernance et le financement du projet.

CVE finance, développe et pilote la construction du projet, Enercoop est missionné sur la phase de concertation et sur les actions pédagogiques autour du projet ; et Énergie Partagée participe au développement du parc aux côtés de CVE, depuis le début. Il est prévu que les acteurs locaux rejoignent le projet après la mise en service, via la Centrale Villageoise sur le Toit des Alpilles.

5 300 panneaux seront donc installés sur 3 hectares, pour une puissance totale de 2,6 MWc. L’électricité produite, environ 4 GWh par an, permettra de répondre aux besoins en électricité (hors chauffage et eau chaude) de plus de 4 000 personnes.

Le chantier débutera en octobre 2024 pour une mise en service prévue fin 2025.

Financement du projet et retombées économiques pour le territoire

À l’issue de la mise en service, la répartition du capital sera ainsi organisée : 65 % CVE, 24 % Énergie Partagée, 4 % métropole Aix-Marseille-Provence, et 7 % pour les structures locales (commune et coopérative citoyenne). Soit une représentation citoyenne de plus de 35 % dans le financement du projet.

Cette distribution favorise les retombées économiques locales. La métropole bénéficiera directement du loyer et des taxes, ainsi que des dividendes générés par la vente de l’électricité. Les citoyens ayant investi dans la coopérative locale profiteront aussi des bénéfices du projet, sous la forme de dividendes et de valorisation d’actions.

La vente de l’énergie, initialement prévue via un contrat en PPA avec Enercoop, va finalement se réaliser dans un cadre plus classique de vente sur le marché avec complément de rémunération ; le projet étant lauréat de l’appel d’offres de la Commission de Régulation de l’Énergie. Le projet s’ancre toutefois dans une volonté de redistribuer la valeur sur le territoire et de renforcer les initiatives environnementales locales.

Ainsi, sur la durée de vie du projet (30 ans), le projet allouera une enveloppe budgétaire de 6 000 € par an au bénéfice de projets locaux environnementaux (lutte contre la précarité énergétique, sensibilisation, efficacité énergétique, etc.).

Un projet respectueux de l’environnement

À la suite d’une étude d’impact, il est reconnu que la zone choisie pour le parc photovoltaïque au sol ne présente pas d’enjeux écologiques rédhibitoires, hormis pour la présence d’une espèce végétale menacée : l’Alpiste à épis courts. Un plan d’évitement et de réduction des impacts est intégré à la conception du parc pour limiter, voire éliminer son impact environnemental.

Il prévoit plusieurs mesures comme : une emprise au sol minimale de l’installation, la gestion des espèces invasives, le choix d’une peinture discrète pour les équipements techniques ; ou encore la création de gîtes à reptiles et d’un panneau pédagogique à l’entrée du site.

Le bilan carbone de l’installation est d’environ 1 100 tonnes de CO2, mais la production d’énergie évitera 750 tonnes par an, soit 22 500 tonnes de CO2 évités sur les 30 ans d’exploitation.

À Mallemort, les citoyens et citoyennes s’engagent

La première réunion publique est organisée le 20 juin 2019 par Enercoop PACA et Énergie Partagée Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur. Deux autres réunions publiques suivront en 2021 et 2022. Elles visent à faire connaître le projet aux habitants de Mallemort et des communes alentour, et à rendre compte des résultats de l’étude d’impact environnemental.

Une concertation locale exemplaire

Une étude de contexte local a été menée en amont, auprès de 9 acteurs locaux, pour identifier leurs perceptions, interrogations et attentes sur le projet.

La concertation a commencé en juin 2019, avec un premier atelier pour partager les résultats des études et tirer des conclusions sur l’acceptabilité du projet, l’implication des acteurs dans son développement ; et la mise en place de l’outil local d’investissement. Enercoop anime ces ateliers et invite les habitants et structures du territoire à participer sur deux thématiques :

La centrale photovoltaïque comme support pédagogique pour sensibiliser aux énergies renouvelables

Deux ateliers de concertation ont été organisés sur les outils pédagogiques à mettre en place autour du projet.

Le premier atelier a permis aux participants de lister toutes les actions envisageables et celles à prioriser. Ils ont aussi pu travailler à leur mise en place, en identifiant les acteurs locaux concernés, les moyens nécessaires et la temporalité dans laquelle les inscrire. Le schéma ci-contre montre le résultat de ces réflexions.

Le deuxième atelier portait sur une réflexion plus approfondie de deux actions : créer un kit pédagogique sur le photovoltaïque avec des supports ludiques et proposer des animations dans les écoles/collège ; réaliser trois parcours pédagogiques sur site adaptés aux enfants, collégiens et adultes, en concevant des panneaux pédagogiques graphiques et numériques.

Les impacts environnementaux et paysagers du projet

Deux ateliers de concertation sur l’impact environnemental, paysager et social du parc photovoltaïque ont été proposés aux habitants et acteurs du territoire.

Le premier atelier a permis aux participants de lister les enjeux les plus importants du développement du projet. Ils ont été regroupés en 6 thématiques : l’impact paysager, l’attention portée aux riverains, les impacts écologiques, les enjeux techniques, les enjeux sur les retombées économiques locales, et les enjeux pédagogiques.

Les personnes qui ont souhaité s’impliquer ont eu accès aux différents documents de travail et éléments d’études paysagères et environnementales. Elles ont également pu se prononcer sur les mesures de réduction des impacts, de compensation ou de valorisation, à mettre en place selon les enjeux. Comme le tracé d’un sentier pédagogique et les actions à mettre en place localement.

Lors du deuxième atelier, les habitants ont pu échanger avec Pierre Volte du bureau d’études Ecomed, en charge des recensements faune/flore sur site, et Delphine Déméautis, paysagiste en charge de travailler l’insertion paysagère du projet.
Ils ont ainsi pu poser leurs questions et proposer les mesures à intégrer dans le développement du projet. Une visite du site a aussi été organisée, afin qu’ils puissent mieux comprendre l’implantation du parc photovoltaïque.

Les prochaines actions de mobilisation citoyenne

Une enquête publique est en cours auprès des riverains et des personnes habitant dans un rayon de 5 km autour du site ; dans le but de les informer davantage sur le projet et de leur permettre de s’exprimer sur le développement du parc photovoltaïque.

En septembre 2024, quatre classes de l’école Mistral de Mallemort visitaient le site du parc photovoltaïque, dans la perspective de créer un chemin pédagogique. Le Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement du Pays d’Aix (CPIE), CVE et Enercoop présenteront la biodiversité du site avant le projet et la manière dont elle sera conservée après l’installation de la centrale. Le CPIE accompagnera l’élaboration des panneaux pédagogiques jusqu’au mois de mars 2025. Une inauguration du sentier pédagogique est prévue en juin 2025 avec les enfants.

Par la suite, Énergie Partagée organisera une ou plusieurs réunions publiques pour lancer une levée de fonds, permettant aux habitants de participer au capital du projet. Une autre visite de site sera également organisée en 2025.