Les énergies renouvelables citoyennes dans les SRADDET-SRCAE
11 mesures pour un développement local des énergies renouvelables au service des territoires.
Les énergies renouvelables citoyennes : une dynamique riche d’opportunités
Les territoires sont en première ligne de la transition énergétique. La décentralisation de la production d’énergies renouvelables, adaptée aux ressources locales, permet à des acteurs locaux de devenir producteurs d’énergie et acteurs de la transition énergétique.
Depuis 10 ans, ce mouvement se développe et s’accélère, avec plus de 250 installations opérationnelles ou en cours de réalisation en France.
Récemment, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a renforcé les possibilités d’engagement des collectivités et des citoyens dans ces projets. En impulsant ou participant à des projets collectifs locaux d’énergies renouvelables, en consommant de l’énergie verte et en économisant l’énergie, les acteurs locaux agissent non seulement pour la transition énergétique, mais également pour le développement de leur territoire, sur le plan économique, social et démocratique.
Créer de la valeur pour les territoires
Les énergies renouvelables sont de plus en plus compétitives et rentables, mais les bénéfices pour les territoires varient beaucoup selon les projets. En France, un parc éolien terrestre de moyenne puissance (8 MW) génère 3 fois plus de création de valeur sur son territoire d’implantation s’il est porté par les acteurs du territoire plutôt que par des investisseurs externes.
La mobilisation de l’épargne locale permet des retours sur investissements sur toute la durée des projets (soit entre 15 et 20 ans) et les ressources générées sont souvent réemployées dans de nouveaux projets locaux. De nombreux territoires réinvestissent leurs ressources dans des travaux d’efficacité énergétique, luttant contre la précarité énergétique et dégageant ainsi du pouvoir d’achat pour les ménages, tout en contribuant à l’économie locale.
L’achat d’énergie locale permet également un lien de solidarité entre territoires urbains et ruraux, procurant des bénéfices économiques pour ces derniers et contribuant à l’autonomie énergétique de tous.
Rassembler les compétences des acteurs locaux
Par leurs principes d’ouverture et de coopération inclusive, ces projets peuvent fédérer des acteurs très divers du territoire : collectivités, citoyens, associations, PME et grands groupes au service de l’intérêt général local.
Les collectivités sont des acteurs ressources importants dans les projets d’énergie citoyenne et participative. Elles gagnent à faire émerger ces projets sur leurs territoires et à y prendre part : prise en main collective de l’énergie au niveau régional ou local, création de valeur et d’emplois non délocalisables, revenus supplémentaires sur le long terme… De simples consommateurs, les citoyens et les collectivités deviennent pleinement acteurs de la transition énergétique sur leur territoire.
Les régions, en tant que chefs d’orchestre des politiques d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires ont un rôle à jouer pour favoriser l’essaimage de l’énergie citoyenne dans les territoires.
Les SRADDET/SRCAE, avec lesquels les PCAET et les schémas de cohérence territoriale doivent être compatibles, peuvent fixer des objectifs concrets et des règles opposables à décliner au niveau local.
11 mesures à intégrer aux SRADDET-SRCAE
1. Dans la partie « diagnostics et enjeux » du rapport, rendre compte des constats et des enjeux pour soutenir l’énergie citoyenne
Le diagnostic des projets d’énergie renouvelable portés par les acteurs locaux pourra être possible en sollicitant systématiquement les acteurs suivants : les services « énergie » des régions et des intercommunalités, les agences régionales de l’énergie, les directions régionales de l’ADEME et les réseaux régionaux d’énergie citoyenne.
Des cartographies des zones propices au développement de la production renouvelable permettront d’établir une vision claire de leur développement et de déterminer ainsi le potentiel pour les acteurs locaux.
2. Dans les « objectifs et orientations stratégiques » du rapport, afficher un objectif chiffré pour les énergies renouvelables citoyennes
Pour construire une politique régionale cohérente et volontariste, il convient que la région se dote d’un objectif raisonnable, volontariste et suivi.
Le collectif pour l’énergie citoyenne préconise un objectif dans le SRADDET-SRCAE de 15 % de la production d’énergie de source renouvelable aux mains des citoyens, des collectivités territoriales et des acteurs économiques locaux d’ici à 2030.
Se doter d’un objectif chiffré permet de fixer un cap public, clair et facilement présentable. Il permet aussi de doser les moyens d’action publique à mettre en œuvre pour réussir l’appropriation locale de l’énergie suite à la définition de l’énergie citoyenne, à l’établissement d’un état des lieux régional et à l’engagement sur un objectif.
Par exemple, l’Écosse a fixé un objectif chiffré clair : développer 500 MW d’énergies citoyennes en 2020.
3. Dans les règles générales du fascicule, lister des moyens et des outils à disposition de l’énergie citoyenne pour favoriser son essor
Mettre en place une politique incitative du développement local et collectif des projets d’énergies renouvelables
Mesure 1 : Lancer un appel à projet “développement des énergies renouvelables local et collectif”.
Zoom sur l’expérience d’une région
En 2014, la région Occitanie a lancé un premier appel à projets pour sélectionner 11 projets d’initiatives citoyennes dans le domaine de la production d’énergie renouvelable (toutes filières). L’appel à projets a permis aux lauréats de recevoir un accompagnement technique de long terme et de bénéficier d’un système d’avance remboursable. La région a également mis en place le dispositif de prime à la participation citoyenne : pour 1 € citoyen investi au capital d’une unité de production EnR, 1 € a été financé par la région. Le cadre fixé était :
– 50% maximum des dépenses éligibles ; ou 100 000 € maximum
– 500 € maximum d’aide Région par citoyen “personnes physiques”, avec un minimum de 20 citoyens participants
Cette prime a fortement encouragé la participation citoyenne à la transition énergétique. L’appel à projet a été reconduit tous les ans et a été élargi aux nouvelles dimensions de la région. On compte aujourd’hui 35 lauréats en 4 ans.
Mesure 2 : Mettre les toitures et les terrains du patrimoine régional à disposition des projets renouvelables citoyens et inviter les autres collectivités à élaborer des règles d’urbanisme favorisant le développement de projets d’énergies renouvelables et assurant leur maîtrise locale.
Mesure 3 : Mettre en place un dispositif régional d’avance remboursable pour les projets dont le risque de développement ne peut être mutualisé (généralement des projets < 1 MW) et sur des filières moins matures telles que la méthanisation.
Mesure 4 : Soutenir une économie verte locale et de proximité, notamment au travers de la commande publique responsable, dans une optique de circuit-court de l’énergie.
Zoom sur l’expérience d’une région
La Région Bretagne s’appuie sur trois piliers pour réduire sa fragilité énergétique : sécurisation des approvisionnements, production d’énergies renouvelables et maîtrise des consommations.
Dans les 116 lycées publics dont elle a la charge, cette priorité s’applique pleinement, en lien avec les équipes enseignantes, les élèves et les agents d’entretien. Certains d’entre eux, les lycées Amiral Ronarc’h à Brest, Marie Le Franc à Lorient, Fulgence Bienvenüe à Loudéac, le Blavet à Pontivy, Julien Crozet à Port-Louis et deux lycées de Rennes (Mendès-France et Joliot-Curie) sont alimentés en électricité 100 % renouvelable.
Ce marché, attribué au fournisseur d’électricité coopératif Enercoop pour une durée de 24 mois, traduit la volonté de la Région Bretagne d’une consommation électrique renouvelable. La fourniture 100 % renouvelable de ces huit établissements s’inscrit donc parfaitement dans cette démarche globale.
Mesure 5 : Conclure des conventions (bilatérales ou multilatérales) avec des collectivités afin d’affiner la mise en œuvre du SRADDET sur leur territoire et d’y développer l’énergie citoyenne de manière ambitieuse.
France Urbaine, dans sa publication “Tout savoir sur les SRADDET”, préconise la mise en place de ce type de convention de manière à “affiner conjointement (entre EPCI et régions) la mise en œuvre du SRADDET-SRCAE sur leur territoire”. En effet, les SRADDET seuls ne peuvent entraîner des charges financières supplémentaires pour les autres collectivités.
Dans le processus d’élaboration de ces conventions, les axes de financement définis par les contrats de projet État-Région peuvent être inclus.
Encourager le financement (investissement et subvention) des projets locaux
Mesure 6 : Mettre en place le dispositif « 1 € citoyen – 1 € Région » sur des projets citoyens d’énergies renouvelables.
Mesure 7 : Soutenir financièrement l’accompagnement de proximité des projets, pour renforcer leur montée en compétences et leurs chances de succès.
Renforcer les acteurs locaux pour faciliter les projets d’énergie renouvelable
Mesure 8 : Intégrer les projets renouvelables citoyens dans la communication de la région relative à la transition énergétique.
Mesure 9 : Apporter un appui en ingénierie, par la mobilisation des services régionaux et des SEM spécialisés pour les études de faisabilité techniques et économiques.
Zoom sur l’expérience d’une région
La SEM Nièvre Énergie est la première SEM publique et citoyenne. Elle résulte de l’association du Syndicat Intercommunal d’Énergies, d’Équipement et d’Environnement de la Nièvre (SIEEEN), du conseil régional de Bourgogne- Franche-Comté, de différentes communes et d’une SAS d’investisseurs citoyens locaux. Celle-ci a pour missions l’acquisition de moyens de production EnR, le (co-)développement de projets et la réalisation d’actions de sensibilisation. Ces missions peuvent être menées à bien grâce à l’appui d’acteurs de référence : l’association le Varne, l’Agence locale de l’énergie, le SIEEEN (pour les compétences support) et bien d’autres. Sans eux, les compétences nécessaires auraient été difficiles à acquérir et cela pour un coût bien supérieur.
Des énergies renouvelables au service de la transition énergétique
Mesure 10 : Financer les besoins de rénovation de l’habitat, d’efficacité énergétique et d’amélioration de la qualité des eaux et de préservation de la biodiversité en réinvestissant les recettes locales dégagées par les projets ENR.
Mesure 11 : Disposer de PLUI et SCOT explicites en matière de transition énergétique (rénovation de l’habitat, ENR), notamment dans les collectivités n’ayant pas obligation de mise en place de PCAET.