Développer des projets EnR citoyens : les conclusions de notre premier chantier de co-construction
Un an après son lancement, la première phase de notre “bac à sable du développement” aboutit à plusieurs enseignements et recommandations. Ces conclusions renforcent la solidité du Label Energie Partagée et permettent dès à présent d'améliorer les pratiques de développement de projets EnR citoyens.
En septembre 2023, nous vous annoncions le lancement, au sein de notre mouvement, d’une démarche visant à co-construire une éthique du développement de projets EnR citoyens. Cette démarche, le “bac à sable du développement”, visait à débattre collectivement des fondamentaux de notre mouvement en matière de développement de projets EnR citoyens, à l’épreuve d’expériences concrètes vécues par des porteurs de projet citoyens et leurs partenaires.
Une co-construction menée avec de nombreux adhérents et partenaires du mouvement
Nous avons invité plus de 70 personnes à y participer. Elles représentent les différents types d’acteurs de notre mouvement – des réseaux régionaux, des opérateurs énergétiques territoriaux et des collectifs de citoyens, la tête de réseau nationale d’Énergie Partagée (notamment, les équipes d’Animation nationale et d’Investissement), des collectivités et leurs SEM -, ainsi que des partenaires comme par exemple des développeurs.
En 2022, Énergie Partagée a mené une enquête au sein du mouvement, ce qui lui a permis de définir cinq sujets à travailler en 2023 et 2024. Chaque sujet a donné lieu à un atelier dédié en visioconférence. Lors de chaque atelier, de 2 à 4 retours d’expériences de projets citoyens, qui illustraient spécifiquement le sujet travaillé, ont été présentés par plusieurs témoins successifs (les porteurs de projets et leurs partenaires). Cela a permis de creuser et d’affiner les sujets travaillés à l’aune des réalités du terrain et des acteurs impliqués. Le cycle de cinq ateliers a mobilisé 70 personnes pour un total de 140 participations. Les participant·es ont examiné 19 retours d’expériences impliquant 41 témoins.
À partir des éclairages et des discussions qui ont eu lieu lors de ces ateliers, Arno Foulon, responsable “expertises et label” d’Énergie Partagée, a synthétisé un certain nombre de questions précises. Un groupe de travail dédié composé de 25 adhérents s’est ensuite réuni à deux reprises pour travailler sur ces questions, en tirer des enseignements et élaborer des recommandations,. Dans un second temps, ces recommandations ont été formalisées dans une synthèse écrite, que ce groupe de travail a validé. Cette synthèse a finalement été présentée, discutée et finalisée en Comité Stratégique du Mouvement (CSM).
Ce processus collectif de co-construction par itérations successives, à partir des réalités diverses rencontrées sur le terrain, a ainsi abouti à la formulation de recommandations pour les acteurs du mouvement et de nouveaux critères qui viennent compléter la Boussole de l’énergie citoyenne, l’outil d’évaluation sur lequel se fonde le Label Énergie Partagée.
Selon Arno Foulon, responsable du Label Énergie Partagée, « Nous avons pu mettre les mains dans le cambouis de nombreuses situations particulières et délicates survenues en phase de développement. Les témoins ont joué le jeu et ont accepté de partager en confiance leur réalité et leurs enjeux sous-jacents à ces situations. L’implication de personnes nombreuses et aux profils variés a permis de croiser des regards et des expertises complémentaires. Au final, nous avons réussi un chantier d’intelligence collective particulièrement fructueux, sur des enjeux complexes. »
Un label plébiscité et renforcé
Ce large processus d’échanges et de co-construction montre en premier lieu que le Label Énergie Partagée est reconnu unanimement comme un outil robuste. Les acteurs dans toute leur diversité apprécient de pouvoir s’appuyer sur ses critères complets et précis pour accompagner des projets ou mener leur développement.
Notre label ressort également enrichi et renforcé de cette première phase du chantier. En effet, l’analyse collective des cas concrets et diversifiés dont les réseaux régionaux, les responsables d’investissement d’Énergie Partagée et les partenaires externes ont témoigné, a permis de produire une liste de principes d’action qui permettent à des porteurs de projet de se mettre dès le début du développement sur la trajectoire du Label d’Énergie Partagée. La démarche a également permis de définir et d’affiner deux nouveaux critères. Ceux-ci ont été ajoutés à la Boussole de l’énergie citoyenne, l’outil d’évaluation sur lequel se fonde le Label Énergie Partagée.
Dédier des moyens suffisants à la mobilisation des habitant·es dès la phase de développement
Le Label peut être attribué à des projets d’énergie renouvelable pour lesquels les habitant·es n’ont pas investi directement dans la société de projet. Cela reflète des situations où l’investissement en direct des habitant·es n’est pas possible, en tout cas au moment où la labellisation est demandée.
Néanmoins, une telle situation doit appeler à une vigilance particulière. À cette fin, un critère spécifique est introduit : des moyens suffisants doivent être dédiés à mobiliser des habitant·es dès la phase de développement du projet, pour contribuer à l’émergence ou au développement d’un collectif d’habitant·es.
De plus, la Boussole valorise désormais de façon accrue, par la bonification d’un critère existant, le fait qu’une structure intermédiaire non locale prévoit d’être représentée dans la gouvernance de la société de projet par un collectif d’habitant·es.
Oeuvrer à obtenir le soutien des collectivités d’implantation
Tous les projets citoyens d’énergie renouvelable visent à gagner la confiance des collectivités d’implantation, et souvent à faire avec elles.
Les porteurs de projet doivent informer les collectivités dès le début de leur initiative puis œuvrer à leur adhésion au projet. Il est important de savoir comment la ou les communes d’implantation et l’EPCI se positionnent, et notamment, si l’une d’elles est opposée au projet, de connaître les raisons profondes de son opposition et les éventuelles réserves à lever. Atteindre cet objectif implique également d’engager une démarche de concertation publique volontaire et suffisante avant que les décisions importantes pour la réalisation du projet ne soient prises.
La démarche du bac à sable a ainsi abouti à l’ajout d’un nouveau critère à la Boussole qui vise à encourager les porteurs de projet à obtenir l’adhésion des collectivités d’implantation. Si cette adhésion n’est pas acquise, il s’agit de s’assurer que le porteur de projet a engagé le dialogue nécessaire pour lever les éventuelles objections émanant des collectivités.
Tiers de confiance : un rôle important et réaffirmé pour faciliter les partenariats
Fort de 12 années d’accompagnement et de capitalisation des apprentissages auprès de centaines de projets citoyens, le mouvement Énergie Partagée est maintenant reconnu comme un sachant et un tiers de confiance dans l’énergie citoyenne par les institutions, par les collectivités de plus en plus nombreuses à vouloir maîtriser leur énergie et par un nombre croissant d’opérateurs privés.
Les équipes de la tête de réseau nationale d’Énergie Partagée portent pleinement cette posture de tiers de confiance, qui correspond à une attente forte des partenaires (collectivités, collectifs citoyens, opérateurs privés, …). Nous aidons à créer les conditions de la confiance mutuelle, nous apportons notre expertise sur de multiples registres et nous favorisons la montée en compétence des acteurs.
Les structures d’accompagnement : des tiers de confiance à l’échelle régionale
À l’échelle de leur territoire, ce sont avant tout les structures régionales d’accompagnement et d’animation territoriale (réseaux régionaux et réseau des Générateurs) qui jouent ce rôle de tiers de confiance.
Les ateliers ont souligné l’importance des réseaux régionaux et Générateurs dans leur mission d’animation et de conseil aux territoires, notamment dans leur dialogue avec les collectivités pour les aider à clarifier leurs attentes et leurs intentions. Ces fonctions et les compétences qu’elles requièrent doivent être développées dans les équipes d’animation des réseaux régionaux et, au-delà, dans tout le Mouvement.
Le Comité Stratégique du Mouvement (CSM) réaffirme le rôle de la tête de réseau Énergie Partagée dans la diffusion de ces compétences, en partenariat avec l’ADEME.
Promouvoir et soutenir les projets citoyens dans leur diversité
L’objectif premier du mouvement demeure d’essaimer les projets EnR citoyens et d’accroître le volume d’énergie qu’ils produisent. Le développement des acteurs de l’énergie citoyenne peut en être un moyen mais ne constitue pas un but “en soi”.
De plus, il n’existe pas un modèle unique de projet citoyen d’énergie renouvelable, mais un éventail de démarches qui s’adaptent aux contextes locaux et à la temporalité des projets. Les stratégies de développement peuvent varier, et cette diversité est une richesse.
Ré-affirmer ces deux principes nous a amenés à clarifier et expliciter la doctrine suivante : notre mouvement soutient tous les porteurs de projets d’énergie renouvelable qui visent expressément l’obtention du Label Énergie Partagée pour leurs installations, sans leur imposer d’adhérer à notre mouvement, ni favoriser ses adhérents.
À ce titre, lorsque plusieurs groupements candidateront à l’AMI (Appel à Manifestation d’Intérêt) d’une collectivité pour lui proposer de réaliser un projet citoyen qui obtienne le label d’Énergie Partagée, les équipes d’animation territoriales de notre mouvement manifesteront leur soutien à chacun de ces candidats.
Une nouvelle corde à l’arc d’Énergie Partagée : la méthode « bac à sable »
Cette première démarche de bac à sable d’Énergie Partagée sur le développement EnR s’achève sur une réussite :
- Un label robuste à l’épreuve de la diversité des situations rencontrées ; une confiance forte dans l’outil et dans notre capacité à continuer de le faire évoluer en phase avec le secteur et les réalités de terrain.
- Une réaffirmation et la clarification de principes clés pour notre mouvement.
- De nouvelles améliorations du label, qui vont permettre aux acteurs du mouvement d’ajuster leurs postures dans le développement de projets citoyens.
Cette démarche de co-construction, ambitieuse et stimulante, incarne à merveille l’ADN coopératif d’Énergie Partagée. Elle pourra être de nouveau engagée à l’avenir, pour poursuivre l’élaboration de pratiques de développement en phase avec nos valeurs fondamentales et avec les ambitions du mouvement, et continuer à adosser solidement le Label Énergie Partagée aux réalités de terrain. Les instances et les équipes d’Energie Partagée continuent de porter leur attention et leur intérêt à la diversité des expériences rencontrées dans le Mouvement, et d’identifier les sujets qui demain continueront de faire grandir le mouvement
Pour aller plus loin : les outils du Label Énergie Partagée
Retrouvez les outils de notre label :
- le guide de la labellisation Énergie Partagée
- le référentiel d’évaluation du label : la Boussole de l’énergie citoyenne
- nos chartes additionnelles par filière (méthanisation, hydroélectricité, photovoltaïque au sol)
- nos principes de développement EnR en vue de la labellisation par Énergie Partagée
- le kit d’utilisation du label