D’un projet modeste à un réseau de chaleur bois-énergie ambitieux
Au Bourget-du-Lac, une liste électorale aux objectifs environnementaux affirmés a remporté les dernières élections municipales. Forte de ses engagements, cette commune de 5000 habitants et habitantes a souhaité agir pour la transition en développant plusieurs projets d’énergies renouvelables. Suite à une rencontre avec l’Asder puis ForestEner, acteur majeur de la chaleur citoyenne en Rhône-Alpes, un petit projet centré sur quelques bâtiments et logements collectifs a grossi, pour devenir un projet bois-énergie plus ambitieux.
La nature, le dimensionnement et le montage du projet ont été l’objet de nombreuses réflexions. L’installation devait être suffisamment large pour qu’un maximum de personnes puissent en bénéficier, mais pas trop importante, afin de disposer d’un espace suffisant pour construire l’unité de production dans une commune déjà dense. D’autre part, les citoyens devaient y trouver leur place, la mairie affichant une volonté claire de gouvernance partagée avec les acteurs du territoire. Enfin, il lui fallait trouver les compétences techniques et le financement initial qui lui manquaient.
L’union des compétences… et des énergies !
L’idée d’une délégation de service public a ainsi germé. Une consultation est lancée, à laquelle ForestEner répond avec un groupement d’entreprises locales. Sa proposition : une production de chaleur issue à 95 % d’énergie renouvelable via une chaufferie bois. Pour la porter, une société de projet dédiée, Chaleur Partagée du Bourget-du-Lac incluant ForestEner, la commune, la centrale villageoise locale (Eau et Soleil du Lac) – qui porte déjà de son côté deux projets, une centrale photovoltaïque et une mini-centrale hydroélectrique – ainsi qu’Énergie Partagée et la SEM Savoie EnR. Pour Forestener et Énergie Partagée, il s’agit là de la première société de projet dédiée à un réseau de chaleur unique.
Nécessitant un investissement de 4,2 millions d’euros, la chaufferie est subventionnée à hauteur de 3 millions d’euros par l’ADEME et via les CEE (Certificats d’Économie d’Énergie). Les 1,2 million restants se découpent entre les actionnaires : fonds propres des structures publiques et citoyennes, SEM et appel à l’épargne citoyenne. Énergie Partagée apporte une avance de 500 000 euros en compte courant d’associé.
Particularités : récupération de chaleur industrielle et 330 logements alimentés
D’une puissance de 4 GWh/an, la chaufferie et son réseau de chaleur alimentent plusieurs bâtiments communaux, le CROUS ainsi que 330 logements (copropriétés et logements sociaux) à partir de septembre 2025.
Suite à des études complémentaires, une minoterie voisine, la société Degrange, a été intégrée à l’installation. La chaleur fatale générée par ses cheminées (qui fabriquent de la farine pour toute la Savoie et fonctionnent 350 jours/an) sera récupérée et couvrira 10 à 15 % du réseau de chaleur. Cela permettra d’éteindre les chaudières bois en été et d’améliorer leur fonctionnement, ainsi que la qualité de l’air.
Un projet vertueux qui dynamise le local
Le réseau de chaleur du Bourget-du-Lac constitue une action concrète et locale de sortie des énergies fossiles, avec une acculturation des citoyens aux énergies renouvelables. Ces derniers ont également la possibilité de s’impliquer directement, en représentant Eau et Soleil du Lac au sein de l’instance de gouvernance de la société de projet. ForestEner a recruté une chargée d’animation citoyenne qui travaille avec la centrale villageoise, composée uniquement de bénévoles. Intégrer une entité déjà forte de 17 installations bois-énergie en fonctionnement permet également une rapide montée en compétences de ces derniers, qui ne travaillaient jusqu’à présent que sur des projets d’électricité.
Parallèlement, la commune a entrepris de rencontrer des fournisseurs locaux de combustible bois. L’un deux, distant de 10 km seulement, va voir son activité doubler en devenant fournisseur pour la chaufferie. Des discussions ont par ailleurs été lancées pour couvrir une partie de l’approvisionnement bois via les sous-produits d’exploitation forestière au sein des forêts communales et privées. C’est ainsi une vraie dynamique territoriale qui s’est mise en place autour du projet, avec de nouvelles coopérations humaines, économiques et une réflexion approfondie sur son empreinte environnementale locale.