L’énergie citoyenne : trait d’union entre transition énergétique et développement des territoires
Faut-il choisir entre transition énergétique et développement économique décentralisé ? À l’heure de la révision des objectifs de la loi de transition énergétique à travers la Programmation pluriannuelle de l’énergie, Énergie Partagée rappelle l’impératif d’une transition énergétique citoyenne.
La transition énergétique ne se fera réellement que si les territoires et leurs habitants en sont acteurs et en bénéficient directement.
La Programmation pluriannuelle de l’énergie entend appuyer “le développement de l’investissement participatif dans les projets par les citoyens et les collectivités locales”. Ce souhait doit s’accompagner de mesures incitatives claires.
A l’heure où il apparaît plus que jamais évident que la transition énergétique ne pourra réussir sans appropriation citoyenne, alors que les enjeux de gouvernance collective de cette transition ont fait irruption dans le débat public, il est temps de donner à l’énergie citoyenne et aux nombreuses initiatives existant sur les territoires la visibilité et le soutien qu’elles nécessitent !
Un juste partage des recettes locales issues de ressources locales
Le développement local des énergies renouvelables porté par les citoyens et les collectivités renforce le développement économique des territoires : circuit court de l’épargne, recours aux compétences locales, emplois non délocalisables, nouvelles recettes pour les collectivités…
Selon l’Atlas Européen de l’Énergie, en 2018, les citoyens et les coopératives (majoritairement allemandes) se classent 14ème plus gros producteurs d’électricité en Europe, avec des des impacts en termes de retombées économiques locales directes et indirectes de 5 à 9 fois supérieurs à ceux des projets portés par les entreprises classiques privées ou pilotés par les états.
Les 300 projets d’énergies renouvelables citoyennes en France apportent la preuve des retombées économiques locales, qui renforcent et irriguent l’économie globale des territoires. Ils montrent comment les soutiens de l’État (Obligation d’Achat, Appels d’Offres CRE avec bonus citoyen) peuvent être bonifiés au bénéfice réel des territoires, notamment ruraux. C’est aussi l’occasion de sensibiliser les citoyens et leurs élus aux enjeux de réduction des consommations. Les retombées financières des projets locaux sont un moyen pour accompagner cette indispensable démarche.
Sur les territoires, les collectivités, les citoyens, les agriculteurs jouent un rôle important dans le développement des énergies renouvelables. Il paraît essentiel de soutenir l’implication des acteurs publics et de la société civile par une affirmation et un renforcement de mesures nationales existantes.
Soutien à l’investissement participatif ou à la participation citoyenne ?
Énergie Partagée alerte sur la définition du vocable « participatif » qui, dans une interprétation floue, peut se révéler être le faux nez de pratiques financières très profitables d’organismes purement financiers, au détriment de réelles retombées locales durables et structurantes pour les économies des territoires. La vraie participation, c’est bien celle des citoyens à la gouvernance des projets, et pas seulement au financement partiel des emprunts.
Au-delà de cette annonce, nous attendons des mesures claires et structurantes pour apporter un cadre adapté à la collecte de l’épargne locale dans les projets d’énergies renouvelables portés par les acteurs du territoire. Nous rappelons l’enjeu d’une véritable maîtrise des décisions par les acteurs du territoire qui passe par un cadre plus incitatif sur l’investissement citoyen.
La France en deça des orientations européennes sur l’énergie citoyenne
La PPE française reste timorée sur l’engagement des citoyens alors même que cette piste des “communautés énergétiques” est perçue par la Commission Européenne comme un levier majeur d’acceptation et de développement des énergies renouvelables : La Commission européenne estime que d’ici 2030, des communautés énergétiques pourraient produire plus de 50 GW d’énergie éolienne et plus de 50 GW d’énergie solaire, représentant respectivement 17 % et 21 % de la capacité installée.
Pour la France, Énergie Partagée et les acteurs de l’énergie citoyenne se fixent l’objectif de 15 % des installations d’énergies renouvelables aux mains des acteurs du territoire en 2030.
Un objectif atteignable si l’État acte la volonté des territoires de se réapproprier ce levier économique et écologique de la production d’énergie locale.
Des solutions existent ! Quelques propositions pour enrichir la PPE
Outre l’inscription de l’objectif des 15 % d’énergies renouvelables citoyennes en 2030 dans la Programmation pluriannuelle de l’énergie, Énergie Partagée et les acteurs de l’énergie citoyenne proposent plusieurs mesures susceptibles de contribuer à l’atteindre, et notamment :
- permettre à toutes les régions de développer l’énergie solaire, en régionalisant les tarifs d’achat et complément de rémunération de l’électricité photovoltaïque,
- généraliser la prime à l’investissement participatif au tarif d’achat et, pour les appels d’offres, la conditionner à une détention des titres par les citoyens pendant 20 ans et non seulement trois ans.
- sanctuariser les tarifs d’achat hors des appels d’offre sur les projets de moins de 15 MW en éolien.
- Instituer une incitation fiscale à l’investissement dans le capital des sociétés de projets d’énergie renouvelable relevant de l’ESS ou agréées ESUS.
- Investir dans l’ingénierie de développement des dynamiques citoyennes.